mercredi 13 mars 2024

 


"Avant même que la purification tranquillisante de la nature extérieure ait été réalisée ou avant qu'elle ne soit complète, on peut, par une puissante force d'appel et d'aspiration, par une volonté véhémente ou un effort violent ou par une discipline et une méthode efficaces, briser le mur qui fait écran entre notre être intérieur et notre perception extérieure, mais ceci peut être un mouvement prématuré qui ne va pas sans danger sérieux. En entrant au-dedans de soi, on peut en effet se trouver au milieu d'un chaos d'expériences étranges et supranormales dont on ne possède pas la clef, ou devant une poussée des forces subliminales ou cosmiques, subconscientes, mentales, vitales, physiques subtiles, qui peuvent ébranler l'être à l'excès ou l'entraîner dans le chaos, l'emmurer dans une prison obscure, ou le faire errer dans un désert de fascination, de séduction et de tromperie, ou encore le jeter dans un champ de bataille obscur, plein d'oppositions secrètes, traîtresses et fallacieuses, ou ouvertes et violentes. Des êtres, des voix et des influences peuvent se manifester à la perception, à la vision, à l'ouïe internes, et se faire passer pour l'Être Divin, ou ses messagers, ou pour des Puissances et des Divinités de Lumière, des guides sur le chemin de la réalisation, alors qu'en vérité ils ont un caractère tout différent."

Sri Aurobindo

lundi 4 mars 2024

L'art de la réalisation

 

Réaliser l'expérience de Dieu grâce au contact transformateur d'un gourou ou de quelque adepte sans un effort personnel n'est que velléité. En premier lieu, les yogis assez sages pour pouvoir impartir par leur seule sagesse l'expérience divine à un sâdhaka [aspirant spirituel] indépendamment de la compétence de ce dernier sont très, très rares. Par ailleurs, ces sages exceptionnels se tiennent à l'écart de toute publicité et n'exhibent pas ordinairement leurs pouvoirs spirituels. Aussi, rencontrer ces rares âmes pour leur contact transformateur est extrêmement difficile. L'expérience spirituelle n'est pas une chose qui s'échange contre de l'or ou de l'argent.

Il existe de nos jours des professeurs de yoga qui semblent vouloir commercialiser Dieu, le Yoga et la religion, et qui prétendent pouvoir transformer un individu et mettre n'importe qui en mesure de réaliser Dieu en un jour, voire une minute. Dans la plupart des cas ces gens sont des fraudeurs. Par conséquent, ne nous reposons pas sur nos lauriers avec l'espoir qu'un gourou viendra un jour à notre rencontre ou même répondra à notre appel pour nous montrer la lumière spirituelle sans effort de notre part, soit dans une autodiscipline, soit dans une contemplation et une méditation spirituelles traditionnelles. Même pour avoir une vision temporaire de Dieu, il faut lutter durement et s'adonner à une vie spirituelle intense.

Le sentier de la réalisation de Dieu, dit-on, est comme le fil tranchant du rasoir. L'effort spirituel peut se comparer à un combat serré qui exige une discipline ardue, un courage et une patience des plus grands et une activité continuelle plus intense qu'il n'est requis d'un guerrier ordinaire sur le champ de bataille. Le soldat spirituel doit être, à chaque moment de sa vie, aussi vigilant qu'actif ; il doit examiner minutieusement ses motifs et son attitude, et agir avec circonspection de crainte que son travail ne devienne mécanique ou simplement routinier ; un effort mécanique serait stérile.

Un peu d'indolence et de manque d'intérêt de la part du chercheur spirituel, et son ascension vers Dieu peut être interrompue. Un petit écart dans sa motivation et il peut s'écrouler instantanément. Un rien d'intérêt pour les choses de ce monde qui s'insinue dans son cœur, et sa victoire spirituelle est handicapée. Tout gain matériel ne signifie pas forcément une perte spirituelle, mais le désir de chaque gain matériel signifie un ralentissement proportionnel dans le zèle au service de l'Éternel. Chérissez les plaisirs profanes et vous perdez la dynamique divine (ânanda). Pourquoi en est-il ainsi ? Dieu seul le sait ! Mais c'est un fait indéniable. "Meurs et entre dans la Vie" est la règle divine.

La Sadhana, toutefois, n'est jamais sans heurts. Le plus souvent elle est faite de hauts et de bas. Tout au long de la Voie — et surtout lorsqu'il atteint des plateaux stériles et rencontre des épreuves et des tentations — le sâdhaka doit s'armer de persévérance.

Le vrai chercheur spirituel (uttama sâdhaka) est toujours poussé vers l'avant par une détermination ferme et sans compromission qui correspond exactement à l'exhortation populaire : "Marche ou crève". Les obstacles ne le rebutent ni ne l'épuisent et le temps ne le décourage pas non plus. "Que l'expérience divine prenne un instant ou d'innombrables naissances, je ne m'arrêterai pas, quoi qu'il arrive, tant que je ne L'aurai pas trouvé." C'est là le bon esprit qui l'anime et qui seul peut le mener jusqu'à Dieu.

La persévérance toutefois ne doit pas être confondue avec la complaisance. Elle exige que nous assumions notre tâche spirituelle résolument et patiemment, malgré toutes les difficultés, les dépressions et les dangers du "voyage".

~ Chandra Swami

L'art de la réalisation



vendredi 24 février 2023

 

"Du jour où tu regardes avec des yeux vrais, il n'est pas une seule chose au monde qui ne soit pleine de sens et n'apporte son message, pas une.  C'est comme si tout se liguait pour nous obliger à comprendre.  Le Destin n'est pas fait pour nous écraser ni pour nous punir... il est fait pour nous contraindre à grandir..."   

Satprem, "Par le corps de la terre"



mercredi 30 mars 2022



"Dans tout ce tintamarre surnaturel, il manque quelque chose. Et en vérité, ce quelque chose est tout. Si notre naturel ne devient pas plus vrai, aucun surnaturel ne pourra y remédier; si notre demeure intérieure est laide, nul cristal miraculeux n'éclaircira nos jours, nul fruit n'étanchera jamais notre soif. Le paradis est à faire sur terre, ou il ne sera nulle part. Parce que nous nous emportons partout avec nous, même dans la mort, et tant que cet instant "stupide" ne sera pas plein de ciel, aucune éternité ne s'allumera d'aucune étoile. C'est dans le corps et dans le quotidien qu'il faut transmuer, sinon aucun or ne brillera, ici ni ailleurs et pour les siècles des siècles. Il ne s'agit pas de voir en rose, ni en vert ni en or, mais de voir la vérité du monde, qui est tellement plus merveilleuse que tous les paradis, artificiels ou non, parce que la terre, cette toute petite terre parmi les millions de planètes, est le lieu expérimental où la suprême Vérité de tous les mondes a choisi de s'incarner dans ce qui semble le contraire d'elle-même, et par la vertu même de cette contrariété, de devenir la toute-lumière dans l'obscurité, la toute-largeur dans la petitesse, l'immortalité dans la mort et la plénitude vivante dans chaque atome et chaque instant."

Satprem-La genèse du surhomme

vendredi 10 décembre 2021

 



"On a beaucoup de mal à comprendre que le Suprême fait tout, tout le temps. Voilà. Et que nous sommes seulement des idiots brouillons qui voulons que ce soit autrement parce que nous ne comprenons rien à rien"

. — Mère, citée par Satprem dans Mère, L’Espèce Nouvelle

jeudi 19 août 2021

 "Le soleil est rentré dans mes veines et transformé tout en or"

William Turner



mardi 2 février 2021

Ça aime partout

 


Agenda

22 juillet 1964

Puis, immédiatement, sans transition, j'ai été comme plongée dans le bain de l'Amour du Suprême... avec la sensation de quelque chose qui est sans limite; c'est-à-dire, quand on a la perception de l'espace, que c'est partout (c'est au-delà de la perception de l'espace, mais dans la perception de l'espace, c'est partout). Et c'est une sorte de masse vibratoire homogène, IMMOBILE, et pourtant avec une intensité de vibration sans pareil, qui peut se traduire par une lumière chaude, dorée (mais ce n'est pas ça, c'est beaucoup plus merveilleux que cela!). Et alors, c'est partout à la fois, partout identique à soi-même, sans alternances de haut et de bas, sans changement, dans une intensité de sensation qui est invariable. Et ce «quelque chose» qui est propre à la nature divine (qu'il est très difficile d'exprimer en des mots) est à la fois immobilité absolue et intensité vibratoire absolue. Et Ça... ça aime. Il n'y a pas de «Seigneur» et il n'y a pas de «choses»; il n'y a pas de sujet, il n'y a pas d'objet. Et Ça aime. Et comment dire ce que c'est que Ça?... C'est impossible. Et Ça aime partout et tout, tout le temps, en même temps.

Et toutes ces histoires que tous ces soi-disant saints et sages ont racontées, que l'Amour de Dieu «va et vient», oh! c'est d'une stupidité sans nom! – C'est LÀ, éternellement; Ça a toujours été là, éternellement; Ce sera toujours là, éternellement, toujours semblable à soi-même et au maximum de sa possibilité.

Ce n'est pas parti, et ça ne pourra plus partir maintenant.

Alors une fois que l'on a vécu Ça... on devient si irrévocablement conscient que tout dépend de la perception individuelle, entièrement; et cette perception individuelle (de l'Amour divin) dépend, naturellement, de l'insuffisance, l'inertie, l'incompréhension, l'incapacité, du fait que les cellules ne peuvent pas contenir ni garder la Vibration, enfin de tout ce que l'homme appelle son «caractère» et qui provient de son évolution animale.


mercredi 7 octobre 2020

L’ouïe divine

 

Tous les sons, toutes les voix sont devenus Ta voix,

musique et tonnerre et le cri des oiseaux,

babil de la vie sur ses peines et ses joies,

cadence du langage humain, mots murmurés,

le rire d’allégresse énorme de la mer,

l’avion altier vrombissant dans l’air conquis,

l’auto claironnant à la terre son hymne à la vitesse,

le bourdonnement réticent de la machine, le hurlement de la sirène

sonnant dans le cor des vents de l’Espace

un appel de distance et de mystère,

souvenirs de terres ensoleillées et de routes océaniques

sont maintenant des accents merveilleux et des thèmes de Toi.

Une harmonie secrète se glisse dans le coeur aveugle

et tout devient beau parce que Tu es.

(Sri Aurobindo, Sonnets et autres poèmes 1938/39)


lundi 19 août 2019

POEM OF THE ATOMS

" Ô Jour lève-toi, les atomes sont en train de danser.
Grâce à Lui, l'univers est en train de danser.
Les âmes dansent, triomphant avec extase.
Je murmurerai dans ton oreille où cette danse les mène.
Tous les atomes dans l'air et le désert le savent bien, ils semblent fous.
Chaque simple atome, heureux ou misérable, tombe amoureux du soleil, dont rien ne peut être dit. »
                                                                                         Rumi

jeudi 6 juin 2019

Agenda du 6 juin 2019



Le travail, même manuel, est une chose indispensable à la découverte intérieure. Si l'on ne travaille pas, si l'on ne met pas sa conscience dans la matière, celle-ci ne se développera jamais. Laisser la conscience organiser un peu de matière à travers son corps est très bon. Mettre de l'ordre autour de soi, aide à mettre de l'ordre en soi.

Une autre chose aussi:

On doit organiser sa vie non pas selon des règles extérieures et artificielles, mais selon une conscience organisée intérieure, parce que si on laisse la vie sans lui imposer le contrôle de la conscience supérieure, elle devient flottante et inexpressive. C'est gaspiller son temps, dans ce sens que la matière reste sans utilisation consciente.

Mère

dimanche 12 mai 2019

L'être psychique



L'être psychique n'est pas au-dessus mais derrière ; il est situé derrière le cœur, son pouvoir n'est pas une connaissance, mais un sentiment essentiel ou spirituel : il a au plus haut degré le sens clair de la Vérité et une sorte de perception innée de la Vérité qui est de la nature d'une perception de l'âme, d'un sentiment de l'âme.
C'est notre être le plus profond, et il soutient tous les autres : mental, vital, physique, mais il est aussi très voilé par eux et doit agir sur eux comme une influence plutôt que par son droit souverain à agir directement ; son action directe ne devient normale et prépondérante qu'à un stade élevé de développement ou par le yoga.
Ce n'est pas l'être psychique qui, comme vous le sentez, vous donne des intuitions sur l'avenir ou vous met en garde contre les conséquences de certaines actions : c'est une certaine partie de l'être intérieur, tantôt le mental intérieur, tantôt le vital intérieur, tantôt (cela se peut) le Pourousha physique intérieur ou subtil.
L'être intérieur - mental intérieur, vital intérieur, physique intérieur ou subtil - sait beaucoup de choses qui ne sont pas connues du mental extérieur, du vital extérieur, du physique extérieur, car il a un contact plus direct avec les forces secrètes de la Nature.
L'être psychique est, de tous, le plus intérieur ; ses prérogatives sont une perception de la vérité qui est inhérente à la substance la plus profonde de la conscience, un sens du bien, du vrai, du beau, du Divin.

Sri Aurobindo

Lettres sur le Yoga
Plans et parties de l'être

lundi 29 avril 2019

En trois jours, j’étais libre



Et une fois que nous sommes le maître du silence, nous sommes nécessairement le maître du monde mental parce que, au lieu d’être sempiternellement cramponné à la même longueur d’onde, nous pouvons parcourir toute la gamme des ondes et choisir ou rejeter ce qui nous plaît.

Mais laissons Sri Aurobindo nous décrire lui-même l’expérience telle qu’il l’a faite la première fois avec un autre yogi, du nom de Bhaskar Lélé, qui passa trois jours avec lui : 


Sri Aurobindo - Mai 1908
Tous les êtres mentaux développés, du moins ceux qui dépassent la moyenne, doivent, d’une façon ou d’une autre, à certains moments de l’existence et dans certains buts, séparer les deux parties de leur mental : la partie active, qui est une usine de pensées, et la partie réservée, maîtresse, à la fois Témoin et Volonté, qui observe, juge, rejette, élimine ou accepte les pensées, ordonnant les corrections et les changements nécessaires ; c’est le Maître de la maison mentale, capable d’indépendance. Mais le yogi va encore plus loin ; il est non seulement le maître du mental, mais, tout en étant dans le mental, il en sort pour ainsi dire, et il se tient au-dessus ou tout à fait en arrière, libre. Pour lui, l’image de l’usine de pensées n’est plus valable, car il voit que les pensées viennent du dehors, du Mental universel ou de la Nature universelle, parfois formées et distinctes, parfois sans forme, puis elles reçoivent une forme quelque part en nous.
Le travail principal de notre mental est de répondre et d’accepter ou de refuser ces ondes de pensée (de même pour les ondes vitales et les ondes d’énergie physique subtile), ou de donner une forme mentale personnelle à cette substance mentale (ou aux mouvements vitaux) venus de la Nature-Force environnante.
J’ai une grande dette envers Lélé pour m’avoir montré ce mécanisme : «Asseyez-vous en méditation, me dit-il, mais ne pensez pas, regardez seulement votre mental ; vous verrez les pensées entrer dedans. Avant qu’elles ne puissent entrer, rejetez-les, et continuez jusqu’à ce que votre mental soit capable de silence complet.»
Je n’avais jamais entendu dire avant, que les pensées puissent venir visiblement du dehors dans le mental, mais je ne songeai pas à mettre en doute cette vérité ou cette possibilité ; simplement, je m’assis et fis comme il m’était dit. En un instant, mon mental devint silencieux comme l’air sans un souffle au sommet d’une haute montagne, puis je vis une, deux pensées venir d’une façon tout à fait concrète, du dehors. Je les rejetai avant qu’elles ne puissent entrer et s’imposer à mon cerveau. En trois jours, j’étais libre.
À partir de ce moment, l’être mental en moi devint une Intelligence libre, un Mental universel. Ce n’était plus un être limité au cercle étroit des pensées personnelles, comme un ouvrier dans une usine de pensées, mais un récepteur de connaissance qui recevait des cents royaumes de l’être, libre de choisir ce qu’il voulait dans ce vaste empire de vision et ce vaste empire de pensée.


Bhaskar Lélé

Parti d’une petite construction mentale où il se croyait à l’aise et très éclairé, le chercheur regarde derrière lui et il se demande comment il a pu vivre dans pareille prison. Il est frappé surtout de voir comment pendant des années et des années il a vécu entouré d’impossibilités, et comme les hommes vivent derrière des barrières : «On ne peut pas faire ceci, on ne peut pas faire cela, c’est contraire à telle loi, contraire à telle autre, c’est illogique, ce n’est pas naturel, c’est impossible…» Et il découvre que tout est possible, et que la vraie difficulté est de croire que c’est difficile. Après avoir vécu vingt ans, trente ans dans sa coquille mentale, comme une sorte de bigorneau pensant, il commence à respirer au large.

Satprem dans son livre Sri Aurobindo ou l'Aventure de la Conscience

lundi 22 avril 2019

Offrande



Si en faisant ce que vous avez à faire - quoi que ce soit, quelque travail que ce soit - si vous le faites, et qu’en le faisant vous ayez soin de ne pas oublier le Divin, de Lui offrir ce que vous faites, et d’essayer de vous donner à Lui de façon qu’Il puisse changer toutes vos réactions - au lieu qu’elles soient égoïstes, mesquines, stupides et ignorantes, en faire quelque chose de lumineux, de généreux -, alors là, vous aurez fait un progrès. Et non seulement vous aurez fait un progrès, mais vous aurez aidé au progrès général.
Je n’ai jamais vu de gens qui aient tout lâché pour venir s’asseoir dans une contemplation plus ou moins vide (parce qu’elle est plus ou moins vide), je n’ai jamais vu que ceux-là fassent des progrès, ou en tout cas leurs progrès sont très minimes.
J’ai vu des êtres qui n’avaient aucune prétention de faire le yoga, qui seulement étaient enthousiasmés par l’idée de la transformation terrestre et de la descente du Divin dans le monde, et qui faisaient leur petit peu de travail avec cet enthousiasme dans le cœur, en se donnant totalement, sans réserve, sans idée égoïste de salut personnel, ceux-là, je les ai vus faire des progrès magnifiques, vraiment magnifiques. Et quelquefois ils sont admirables.
J’ai vu des sannyâsis, j’ai vu des gens qui vivent dans des monastères, j’ai vu des gens qui faisaient profession d’être des yogis, eh bien, je ne donnerais pas un des autres pour une dizaine de ceux-là (je veux dire, en se plaçant au point de vue de la transformation terrestre et du progrès du monde, enfin de ce que nous voulons faire, tâcher que ce monde ne soit plus ce qu’il est et devienne vraiment l’instrument de la Volonté divine, avec la Conscience divine).
Ce n’est pas en vous enfuyant du monde que vous allez le changer.
C’est en y travaillant, modestement, humblement, mais avec une flamme dans le cœur, quelque chose qui brûle comme une offrande. Voilà.

La Mère
13 mai 1953

mardi 16 avril 2019

L'argent



La vraie attitude est celle-ci: l'argent est une force universelle destinée à faire le travail sur terre, le travail nécessaire pour préparer la terre à recevoir les forces divines et à les manifester, et il doit venir entre les mains (c'est-à-dire le pouvoir d'utilisation) de ceux qui ont la vision la plus claire, la plus générale et la plus vraie.

D'abord, la première chose (mais c'est élémentaire), c'est de ne pas avoir le sens de la possession – qu'est-ce que cela veut dire, «c'est à moi»? Qu'est-ce que cela veut dire?... Maintenant, je n'arrive pas très bien à comprendre. Pourquoi les gens veulent-ils que ce soit à eux? – Pour pouvoir l'utiliser comme ils veulent et en faire ce qu'ils veulent et le manier selon leur conception. C'est comme cela. Autrement, il y a, oui, les gens qui aiment mettre ça en tas quelque part... Mais ça, c'est une maladie. Pour être sûrs d'en avoir toujours, ils l'entassent. Mais si l'on comprenait qu'il faut être comme un poste récepteur-transmetteur; que plus le poste est vaste (juste le contraire de personnel), plus il est impersonnel et général, vaste, plus il peut contenir de forces (de «forces», c'est-à-dire, traduit matériellement: de billets ou de monnaie), et ce pouvoir de contenir est en proportion de la capacité d'utilisation la meilleure – la «meilleure», c'est-à-dire au point de vue du progrès général: la vision la plus large, la compréhension la plus large et l'utilisation la plus éclairée, exacte, vraie, non pas selon les besoins falsifiés de l'ego mais selon le besoin général de la terre pour son évolution et son développement. C'est-à-dire que la vision la plus large doit avoir la capacité la plus large.

Derrière tous les mouvements faux, il y a un mouvement vrai: il y a une joie à pouvoir diriger, utiliser, organiser de façon qu'il y ait le minimum de gaspillage et le maximum de résultats. (C'est une vision très intéressante à avoir.) Et ce doit être le côté vrai des gens qui veulent accumuler: c'est la capacité d'utiliser à une très grande échelle.

À mesure que cette vision-là devient plus claire... Il y a longtemps-longtemps, il y a des années et des années que le sens de la possession a disparu; ça, c'est un enfantillage, ce n'est rien, c'est tellement bête! Veux-tu me dire quel plaisir peut avoir quelqu'un à mettre dans une boîte ou dans son mur des quantités de papiers! Un vrai plaisir, il ne peut pas en avoir. Le maximum de plaisir, c'est celui de l'avare qui va ouvrir sa boîte et regarder – ce n'est pas grand-chose! Il y a des gens qui aiment beaucoup dépenser, qui aiment beaucoup posséder et dépenser; ça, c'est autre chose, mais ce sont des natures généreuses qui ne sont pas réglées, qui ne sont pas organisées... Mais la joie de mettre à la disposition de tous les VRAIS besoins, de toutes les NECESSITES, le moyen de s'exprimer, ça, c'est bien. C'est comme la joie de changer une maladie en bonne santé, de changer un mensonge en vérité, de changer une souffrance en joie, c'est la même chose: changer un besoin artificiel et stupide qui ne correspond à rien de naturel, en une possibilité qui devient une chose tout à fait naturelle – on a besoin de tant d'argent pour faire ceci et cela et cela qui est nécessaire, pour arranger ici, réparer là, construire là, organiser là – ça, c'est bien. Et je comprends que l'on aime être le canal conducteur de tout cela pour mettre l'argent juste à l'endroit où il faut. Ce doit être le vrai mouvement des gens qui aiment... (traduit en égoïsme stupide) qui ont besoin d'accaparer.

La combinaison du besoin d'accaparer et du besoin de dépenser (les deux, ignorants et aveugles), combinés ensemble, peuvent faire une vision claire et une utilisation ayant un maximum d'utilité. Ça, c'est bien.

Alors, lentement-lentement, c'est la possibilité de mettre en pratique qui vient.

Mais on a besoin naturellement de cerveaux très clairs et d'intermédiaires très intègres (!) pour pouvoir être partout à la fois et faire tout en même temps. Alors cette fameuse question d'argent serait résolue.

L'argent n'appartient à personne: l'argent est un bien collectif qui ne doit être utilisé que par ceux qui ont une vision intégrale et générale, universelle. Et j'ajouterais quelque chose: pas seulement intégrale et générale, mais aussi essentiellement VRAIE, c'est-à-dire qui peut faire la distinction entre une utilisation conforme au progrès universel, et une utilisation que l'on pourrait appeler de fantaisie. Mais ce sont des détails parce que même les fautes – même, à un certain point de vue, les gaspillages – servent au progrès général: ce sont des leçons à rebours.

Agenda du 10 avril 1968



Les échelons de l'Amour


Ça, le dernier «échelon», c'est la Chose absolument pure. Et la puissance... la puissance créatrice et transformatrice de cette Vibration est inimaginable! Au moment où on la vit, rien n'est impossible. C'est inimaginable.

«D'abord, on aime seulement quand on est aimé...

C'est l'état habituel des humains. Il faut que la vibration d'amour de quelqu'un vienne éveiller l'amour, autrement on est inerte.

«Ensuite on aime spontanément...

C'est déjà une humanité un peu plus développée. On sent l'amour tout d'un coup; on rencontre quelqu'un ou quelque chose – ah! – et ça vient. Seulement...

«Mais on veut être aimé en échange...

On tient beaucoup à être aimé en échange!

«Puis on aime, même si l'on n'est pas aimé...

Ce sont généralement les gens qui sont arrivés à un état yoguique assez avancé.

«Mais on tient encore à ce que son amour soit accepté...

Oui, c'est une expérience que j'ai eue personnellement. Il y a un moment où l'on est tout à fait capable d'aimer sans réponse, on est au-dessus de la nécessité d'être aimé, mais on a encore... pas positivement un besoin mais, au moins, que ce soit senti et efficace.

Après, ça fait sourire.

«Finalement, on aime purement et simplement sans autre besoin ni autre joie que ceux d'aimer.»

Ça, vraiment pour moi, selon mon expérience personnelle, c'est la toute-puissance.

C'est une puissance qui peut réaliser n'importe quoi – n'importe quoi. Il n'est rien qui lui soit impossible.

Seulement, j'ai bien observé aussi que si «ça» se manifestait sans discernement, pourrait-on dire, si c'était quelque chose qui venait s'imposer dans l'atmosphère de la terre sans contrôle et sans discernement, ce serait... Tout ce qui nie ce Pouvoir (nie volontairement ou involontairement) serait comme annulé. Alors les conséquences extérieures, apparentes, seraient... trop formidables. C'est ce que Sri Aurobindo avait écrit; il avait dit qu'il fallait que la Connaissance vienne d'abord. Il faut que la Vérité règne d'abord avant que l'Amour puisse se manifester massivement: a wholesale manifestation [une manifestation en grand].

Maintenant, c'est comme filtré. C'est encore filtré.

Mais la qualité vibratoire de «ça» est quelque chose vraiment qui dépasse toute imagination. Les maladies, les difficultés, les... ça n'a pas de réalité.

Constamment, le corps demandait (ce n'est ni un signe, ni une assurance, ni une preuve: c'est tout cela à la fois), il demandait une espèce de sensation (sensation, si l'on peut appeler cela «sentir») que ce soit «le Seigneur qui gouverne» (je le dis en mots enfantins parce que ce sont les plus vrais), que ce soit le Seigneur qui gouverne. Il demandait «ça» tout le temps, comme un enfant peut demander: «ça» dans tous les innombrables riens que l'on fait tout le temps, qui sont l'étoffe même de l'existence du corps. Cela devenait si intense... Tout ce qui est perçu comme séparé de «ça» devient inerte: de la cendre – inerte sans même la puissance de l'inertie: l'inertie de la poussière. Je veux dire que le roc a une puissance dans son existence, une puissance de cohésion, de durée – même pas cela: de la poussière. Et alors, il y avait constamment-constamment cette prière dans le corps. Et c'est cela qui m'a amenée à l'expérience.

Quand «ça», c'est là, c'est comme si tout se gonflait d'une Puissance dorée, lumineuse, rayonnante: ça a un volume d'intensité!... Si ce n'est pas là, tout est poussière.

Alors, naturellement, il y a constamment dans toutes les cellules, l'aspiration, la volonté intense qu'il n'y ait plus que Ça.

Agenda du 16 avril 1966

Conscience du tout

Jamais le corps n'a été si heureux: ces cellules, d'autres cellules, c'était la vie partout, la conscience partout. Ça se promenait d'un corps à l'autre tout à fait libre et indépendant. Une indépendance cellulaire. Je n'avais jamais eu cette expérience avant. Depuis 91 ans sur la terre, jamais ce corps n'a senti un bonheur pareil: pas de limites, pas d'impossibilités, rien. Tous les autres corps étaient lui. Seulement un jeu de la conscience... qui se promène.


La dualité


Vous devez être conscient de vous-même, de votre nature et de vos mouvements. Vous devez savoir comment et pourquoi vous faites les choses, vous les sentez, vous les pensez. Vous devez comprendre vos motifs et vos impulsions, les forces cachées ou apparentes qui vous font mouvoir. Vous devez, en quelque sorte, démonter en petits morceaux le mécanisme de votre être.

C'est seulement lorsque vous êtes conscient que vous pouvez distinguer et trier les choses, que vous pouvez voir quelles sont les forces qui vous tirent vers le bas et celles qui vous poussent en avant. Et quand vous êtes capable de discerner ce qui doit être de ce qu'il faut éviter, le vrai du faux., le Divin de l'antidivin, vous devez agir strictement selon cette connaissance., c'est-à-dire résolument rejeter l'un et accepter l'autre.

La dualité se présentera à vous à chaque pas, et à chaque pas vous aurez à faire votre choix. Vous devrez être patient, persévérant, vigilant, pleinement "éveillé", comme disent les adeptes. Vous devrez toujours refuser de donner une chance, quelle qu'elle soit, à l'antidivin contre le Divin.

Entretiens 1929~ La Mère





Le Seigneur du Mensonge


"Le pouvoir de ce Titan vient d’un Asoura. Il y a quatre Asouras. Deux ont déjà fait leur conversion, et les deux autres, le Seigneur de la Mort et le Seigneur du Mensonge, ont fait une tentative de conversion en prenant un corps physique - ils ont été étroitement mêlés à ma vie. L’histoire de ces Asouras serait bien intéressante à raconter... Le Seigneur de la Mort a disparu : il a perdu son corps physique, je ne sais pas ce qui lui est arrivé. Quant à l’autre, le Seigneur du Mensonge, celui qui gouverne cette Terre maintenant, il a bien essayé de se convertir, mais il a trouvé cela dégoûtant !
Il s’appelle parfois lui-même le «Seigneur des Nations». C’est lui qui met en train toutes les guerres, et c’est en déjouant ses plans que la dernière guerre a pu être gagnée... Celui-là ne veut pas se convertir du tout, il ne veut pas de la transformation physique ni du monde supramental car ce serait sa fin. D’ailleurs il sait... Nous nous parlons; par-delà tout cela, nous avons des relations. Et après tout, n’est-ce pas (riant), je suis sa mère ! Il m’a dit un jour: «Je sais que tu me détruiras, mais en attendant je ferai toutes les catastrophes possibles.»
C’est cet Asoura du Mensonge qui a délégué le Titan qui est toujours auprès de moi. Il a choisi le Titan le plus puissant qu’il y ait sur la Terre et l’a spécialement envoyé pour attaquer ce corps. Alors, même si l’on parvient à enchaîner ou à tuer ce Titan, il est probable que le Seigneur du Mensonge déléguera une autre forme, et encore une autre, et encore une, pour arriver à ses fins.
Finalement, seul le Supramental aura le pouvoir de détruire cela. Quand le moment sera venu, tout cela disparaîtra, sans qu’il soit besoin de rien faire."

Mère - Le Seigneur du Mensonge / Agenda, tome 1 page 302 :



mardi 9 avril 2019

Les secrets sont simples.

Parce que la Vérité est simple, c'est la plus simple chose au monde, c'est pourquoi nous ne la voyons pas. Il n'y a qu'une Chose au monde, et pas deux, comme les physiciens, les mathématiciens ont commencé à le percevoir, et comme l'enfant qui sourit à la vague le sait bien, sur une grande plage où la même écume semble rouler du fond des temps, et rejoindre un grand rythme qui monte d'une vieille mémoire, qui fond les jours et les peines dans une unique histoire, si vieille qu'elle est comme une présence inaltérable, si vaste qu'elle accroche même son immensité à l'aile d'une mouette. Et tout est contenu dans une seconde, la totalité des âges et des âmes, dans un simple point qui brille un instant sur la folle écume. Mais ce point-là, nous l'avons perdu, et ce sourire, et cette seconde qui chante.

— Satprem, La Genèse du Surhomme, Préambule.



lundi 7 novembre 2016

Mirra Alfassa

Elle s'appelait Mirra Alfassa mais à Pondichéry on l'appelait la Mère. Née en France en 1878 de parents égyptien et turque de confession juive, après des études de peinture à Paris, elle s’intéresse aux sciences occultes alors en vogue en Europe. D’esprit indépendant, elle n’hésite pas à divorcer d’un premier mari peintre et voyage avec son deuxième mari diplomate à travers le monde. C’est en Inde, à Pondichéry, qu’elle rencontre le gourou hindouiste Sri Aurobindo. Elle a alors 43 ans et c’est pour elle une révélation. Elle quitte son deuxième mari pour s’installer définitivement en Inde auprès du sage assigné à résidence à Pondichéry pour activités anticolonialistes. Consacrée "Mère divine" par Sri Aurobindo, elle crée avec lui à un Ashram à Pondichéry, lui donnant vite une dimension internationale. En 1968, elle fonde Auroville, un projet de ville idéale, à 5 kilomètres de l’Ashram. En 1973, elle meurt à l’âge de 93 ans, vénérée par des milliers de disciples en Inde comme à l'étranger. Une vie épique, singulière et controversée, entre deux mondes et deux religions.



Mirra, la Mère de Pondichéry from Laure Poinsot on Vimeo.

samedi 13 août 2016

Les portes du nouveau monde



 EXTRAIT de la GENESE du SURHOMME.
 
Il y a ce feu d'être qui ouvre les portes du nouveau monde….

Mais ce corps au début, n'est qu'une petite étincelle; sa masse ardente, une flamme vacillante qui parfois s'allume et souvent s'éteint, et qu'il faut rallumer encore et encore; C'est un petit cri de suffocation dans la nuit du monde, un besoin d'on ne sait quoi qui se promène avec nous, monte et descends nos méandres, qui nous suit tenacement comme une mémoire d'autre chose, comme un souvenir doré dans la grisaille des jours, comme un appel d'air, un besoin d'espace, un besoin d'aimer, un besoin d'être vrai. Et il grandit ce feu , ce cri:

L'homme est une étroite passerelle, un appel qui grandit (Sri Aurobindo, more poems).
C'est d'abord une petite flamme dans le mental, quelque chose qui tâtonne vers une inspiration plus vaste, une vérité plus grande, une connaissance plus pure, et qui monte, qui monte, qui voudrait même couper toutes les lourdeurs du monde, les entraves, les attaches, les encombrements de la terre, qui s'élève et débouche parfois, pure, aigüe, sur des sommets de lumière blanche où tout est à jamais connu et vrai -- mais la terre, elle, reste fausse; la vie, le corps restent dans la mêlée obscure, et meurent et se décomposent. Alors cette petite flamme blanche commence à prendre dans le cœur: elle voudrait aimer, guérir, sauver, et elle tâtonne ici, tâtonne là, aide le prochain, secourt, se donne et chante quelque chose qui voudrait tout embrasser, tout contenir et prendre la vie entière dans son cœur.Déjà, c'est une flamme plus chaude, plus dense, mais ses minutes d'embrasement sont comme une pâle luciole fragile sur un océan de vie obscur, à chaque instant elle est étouffée, noyée sous la vague et sous nos propres vagues d'obscurité -- rien n'est changé et la vie continue sa ronde.
Alors le chercheur veut faire entrer ce feu, cette vérité ardente dans chaque instant et dans chaque geste, dans son sommeil et dans ses jours, dans son mal et dans son bien, dans toute la vie, et que tout soit purifié, dévoré par ce feu -- que quelque chose d'autre naisse enfin, une vie plus vraie, un être plus vrai. Il entre sur la voie du surhomme. Et ce feu grandit encore, il descend, descend les étages de l'être, s'enfonce dans les caves subconscientes, déloge l'elfe gris, déloge la misère dedans, et brûle de plus en plus continûment, puissamment, comme attisé par la pression obscure.
C'est déjà presque un corps à notre semblance et c'est d'une couleur rouge-vermillon qui déjà tire sur l'or. Mais c'est encore fluctuant et précaire, il manque une assise fondamentale, une base de permanence. Alors le chercheur veut faire entrer ce feu dans sa substance et dans son corps, il veut que sa matière reflète la Vérité, incarne la Vérité, il veut que ça rayonne dehors comme au-dedans.
Il entre sur la voie de l'être supramental. Car en vérité ce moi de feu qui grandit, ce corps ardent qui ressemble de plus en plus à notre archétype divin, à notre frère de lumière sur les hauteurs, qui semble nous déborder de toutes parts et même rayonner autour dans une vibration déjà orange, est le corps même qui formera l'être supramental. C'est la prochaine substance de la terre: "plus dure que le diamant, et pourtant plus fluide qu'un gaz ", C'est la condensation spirituelle de la grande Energie avant qu'elle se transforme en matière.
Mais comment engrener ce feu dans notre matière, comment opérer le passage ou la transfusion de ce corps obscur et mortel à ce corps ardent et immortel ? 
L'expérience est en cours, il est difficile d'en parler, personne ne saura vraiment comment cela se fait jusqu'à ce que ce soit fait. Nul ne connait le pays ni le chemin puisque personne n'est jamais allé là, personne n'a jamais fait un corps supramental !
Mais ce sera fait, aussi inévitablement que l'homme et le singe, et le mille-pattes, étaient déjà faits dans la grande Semence d'or du monde. C'est la dernière aventure de la terre, ou peut-être la première d'une série plus merveilleuse sur une nouvelle terre de vérité. 

Satprem


mardi 19 juillet 2016

La liberté, l'égalité et la fraternité



" La liberté, l'égalité et la fraternité sont trois divinités de l'âme ; elles ne peuvent pas vraiment se réaliser par les mécanismes extérieurs de la société, ni par l'homme tant qu'il vit seulement dans l'égo individuel et dans celui de la communauté .

Quand l'égo réclame la liberté, il arrive à un individualisme compétitif. Quand il revendique l'égalité, il arrive d'abord au conflit, puis il tente de fermer les yeux sur les variations de la Nature et ne connait d'autre moyen que de bâtir une société artificielle et mécanique .

Une société qui cherche la liberté comme idéal, est incapable d'arriver à l'égalité ; une société qui cherche l'égalité sera obligée de sacrifier la liberté . Et parler de fraternité à l'égo, c'est parler d'une chose contraire à sa nature. Tout ce qu'il connait, c'est une association à la poursuite de fins égoïstes communes ; tout ce qu'il est capable de réaliser, c'est une organisation plus rigoureuse afin de répartir également le travail, la production, la consommation et les plaisirs .

Et pourtant, la fraternité est la clef du triple évangile de l'idée d'humanité. L'union de la liberté et de l'égalité ne peut s'accomplir que par le pouvoir de la fraternité humaine ; elle ne peut se fonder sur rien d'autre. Mais la fraternité n'existe que dans l'âme et par l'âme ; elle ne peut exister par rien d'autre. Car cette fraternité n'est pas affaire de parenté physique ni d'association vitale ni d'accord intellectuel .

Quand l'âme réclame la liberté, c'est la liberté de se développer, de développer le divin dans l'homme et dans tout son être. Quand elle réclame l'égalité, ce qu'elle veut, c'est cette même liberté également pour tous, et la reconnaissance d'une même âme , une même divinité dans tous les êtres humains. Quand elle cherche la fraternité, elle fonde cette égale liberté de développement sur un but commun, une vie commune, une unité de pensée et de sentiment, elle-même fondée sur la reconnaissance de l'unité spirituelle intérieure .

En fait, cette trinité constitue la nature même de l'âme ; car la liberté, l'égalité et l'unité sont les attributs éternels de l'Esprit . Reconnaître pratiquement cette vérité, éveiller l'âme dans l'homme et tenter de le faire vivre dans son âme et non dans son égo, tel est le sens intérieur de la religion, et c'est à cela que la religion de l'humanité doit parvenir également si elle veut se réaliser dans la vie de l'espèce.''

Sri Aurobindo, L'idéal de l'Unité humaine, 1919

jeudi 30 juin 2016

L'ORPAILLEUR




  La petite flamme a grandi sous les âges, elle est devenue racine et bête, elle est devenue homme et veut grandir encore. L'heure vient où elle se veut tout amour dans l'homme lui-même enfin. l'heure vient où il faut choisir de retourner aux vieilles catastrophes, ou au grand jour d'une autre conscience. Ah ! Nous sommes le lieu d'une bataille, nous sommes une aventure; il faut choisir ! Plus temps de s'évader, plus temps de chercher dans l'extérieur des choses, dans les temples séniles, les Ecritures, mais de transmuer tout. Plus temps d'inventer des systèmes, encore des systèmes, encore des évangiles, mais de rassembler toutes nos forces et de lancer notre foi très haut, comme un harpon de lumière pour crever le ciel de suie -- et tirer un Rayon d'or qui change la face des choses. Ah! Point nés pour tourner en rond dans les cycles aveugles ! Changeons la vague qui nous emporte en conscience qui roule les mondes -- une conscience qui se souvient dans un corps qui rayonne. Car en vérité, ce qui était au début doit se retrouver à la fin, non plus dans un éclatement solaire où tout est aboli, non plus dans un éclatement noir où tout est englouti, mais dans un corps radieux sur une terre accomplie, dans l'innombrable joie des formes qui expriment Dieu partout. Tout est joie, il faut se souvenir, se souvenir ! Elle est là, tranquille et sûre sous la peau noire des choses. Elle nous aime. Et je devine des profondeurs, des profondeurs sans fin, des étendues de conscience comme des mers frémissantes de soleils. Je sens cela tout proche, comme un sourire derrière un voile. Nous sommes au bord de quelque chose, la vie commence ! Rêvons divinement. Et la lumière dans un corps.
SATPREM

mardi 2 février 2016

Mahâsarasvatî



Mahâsarasvatî est la puissance de travail de la Mère et son esprit de perfection et d'ordre. La plus jeune des quatre, Elle est la plus experte en capacité d'exécution et la plus proche de la nature physique.

Maheshvarî trace les grandes lignes des forces mondiales, Mahâkâlî actionne leur énergie et leur impulsion, Mahâlakshmî révèle leurs rythmes et leurs mesures, mais Mahâsarasvatî préside au détail de leur organisation et de leur exécution, à la relation des parties entre Elles, la combinaison efficace des forces et l'exactitude infaillible dans le résultat et l'accomplissement.

La science, l'art et la technique sont du ressort de Mahâsarasvatî. Elle contient dans sa nature et peut toujours donner à ceux qu'Elle a choisis la connaissance intime et précise, la subtilité, la patience, l'exactitude de l'esprit intuitif et de la main consciente et le regard pénétrant du travailleur parfait.

Cette Puissance est la constructrice vigoureuse, infatigable, soigneuse et efficace, l'organisatrice, l'administratrice, la technicienne, l'artisane et la classificatrice des mondes. Quand Elle entreprend la transformation et la reconstruction de la nature, son action est laborieuse et minutieuse et, bien souvent, à notre impatience Elle semble lente et interminable. Mais Elle est persistante, intégrale et sans défaut. Car sa volonté dans le travail est scrupuleuse, vigilante et infatigable. Se penchant vers nous, Elle voit et touche chaque détail, découvre chaque infime défaut, lacune, perversion ou imperfection et considère et pèse exactement tout ce qui a été fait et tout ce qui reste à faire.

Rien n'est trop petit ni trop trivial en apparence pour son attention. rien ne peut lui échapper, si impalpable, si déguisé ou caché que ce soit. Façonnant et refaçonnant, Elle élabore chaque élément jusqu'à ce qu'il soit parvenu à sa forme vraie, mis à sa place propre dans l'ensemble et qu'il accomplisse son but précis. Dans sa constante et diligente organisation et réorganisation des choses, son regard est à la fois sur tous les besoins et sur la manière d'y faire face, son intuition sait ce qui doit être choisi et ce qui doit être rejeté, et détermine avec succès l'instrument propre, le temps propre, les conditions propres et l'opération propre.

Elle abhorre l'indifférence, la négligence et la paresse, tout travail bâclé, inconsidéré et équivoque, toute maladresse, tout à peu près et tout raté, toute adaptation fausse, tout mauvais emploi des instruments et des facultés. et de laisser un travail non exécuté ou à demi exécuté est pénible et étranger à sa nature. Quand son travail est achevé, rien n'a été oublié, mal placé, omis ou laissé dans un état défectueux. Tout est solide, précis, complet, admirable. 

Rien de moins qu'une parfaite perfection ne peut la satisfaire et Elle est prête à affronter une éternité de labeur si cela est nécessaire à la plénitude de sa création.
C'est pourquoi de tous les pouvoirs de la Mère, Elle est la plus endurante avec l'homme et ses milliers d'imperfections. Douce, souriante, proche et secourable, ne se détournant et ne se décourageant pas aisément, persistant même après l'insuccès répété, sa main soutient chacun de nos pas à condition que nous soyons droits, sincères et que nous n'ayons qu'une volonté. Car Elle ne tolère aucune duplicité et son ironie révélatrice est impitoyable au drame, au cabotinage, à l'illusion et à la prétention.

Une mère pour nos besoins, une amie dans nos difficultés, un conseiller et un mentor constant et tranquille, dissipant par son éclatant sourire les nuages de tristesse, de mauvaise humeur et de dépression, remémorant sans cesse l'aide toujours présente, montrant du doigt l'éternelle clarté du soleil, Elle reste ferme, calme et persévérante dans l'élan profond et continu qui nous pousse vers l'intégralité de la nature supérieure. Tout le travail des autres pouvoirs dépend d'Elle pour sa perfection, car Elle assure la base matérielle, élabore les détails, érige et rivette l'armature de la construction.

Sri Aurobindo, La Mère

mercredi 12 août 2015

A l'écoute de la loi intérieure


La loi intérieure, la vérité de l'être, c'est la présence divine en chaque être humain, ce qui devrait être le maître et le guide de notre vie.
Quand on prend l'habitude d'écouter cette loi intérieure, de lui obéir, de la suivre, d'essayer de plus en plus de la laisser guider la vie, on crée autour de soi une atmosphère de vérité, de paix, d'harmonie, qui naturellement réagit sur les circonstances et, pour ainsi dire, forme l'atmosphère dans laquelle on vit. Quand on est un être de justice, de vérité, d'harmonie, de compassion, de compréhension, de parfaite bonne volonté, cette attitude intérieure, plus elle est sincère et totale, plus elle réagit sur les circonstances extérieures - non qu'elle diminue nécessairement les difficultés la vie, mais elle donne à ces difficultés un sens nouveau, et cela permet d'y faire face avec une force et une sagesse nouvelles; tandis que l'homme, l'être humain qui suit ses impulsions, qui obéit à ses désirs, qui s'embarrasse fort peu de scrupules, qui en arrive à vivre dans un cynisme complet, se moquant de l'effet que sa vie peut avoir sur les autres et des conséquences plus ou loins néfastes de ses actes, celui-là se crée une atmosphère de laideur, d'égoïsme, de conflit, de mauvaise volonté, qui nécessairement agit de plus en plus sur sa conscience et lui donne une âpreté dans l'existence, qui finalement devient un tourment perpétuel.

La Mère

Le regard intérieur


Il y a un état où l'on s'aperçoit que l'effet des choses, des circonstances, de tous les mouvements et de toutes les actions de la vie sur la conscience dépend presque exclusivement de votre attitude vis à vis ces choses. Il y a un moment où l'on devient assez conscient pour s'apercevoir que les choses en elles-mêmes ne sont vraiment ni bonnes ni mauvaise : elles ne le sont que vis à vis de nous; leur effet sur nous dépend absolument de l'attitude que nous avons à leur égard. La même chose, identiquement, si nous la prenons comme un don de Dieu, comme une grâce divine, comme l'effet de l'Harmonie totale, nous aide à devenir plus conscients, plus forts, plus vrais, tandis que si nous la prenons ( exactement la même circonstance) comme un coup donné par le sort, comme une force mauvaise qui veut nous affecter, cela nous diminue, cela nous alourdit, et cela nous enlève et la conscience et la force et l'harmonie. Et la circonstance en elle-même est identiquement la même - cela, je voudrais que vous ayez tous cette expérience-là, parce que quand vous l'avez, vous devenez maître de vous même. Non seulement maître de vous même mais, en ce qui vous concerne, maître des circonstances de votre vie.
La Mère

dimanche 5 juillet 2015

LA TRANSFORMATION



Pratiquement, le travail se fait à travers chacune de nos difficultés psychologiques, symboliques de la même difficulté à travers le monde... si l'on touche une vibration donnée dans un individu, c'est la même vibration qui est touchée dans le monde entier.
"Chacun de vous, dit la Mère, représente une des difficultés qui'l faut vaincre pour la transformation... et cela fait beaucoup de difficultés ! C'est même plus qu'une difficulté ; je crois vous avoir dit autrefois que chacun représente une impossibilité à résoudre ; et quand toutes ces impossibilités seront résolues, l'Oeuvre sera accomplie." Chaque individu, nous le savons, a une ombre qui le talonne et semble contredire le but de sa vie. 
C'est la vibration particulière qu'il doit transformer, son champ de travail, son point impossible. C'est à la fois le défi de sa vie et la victoire de sa vie. C'est sa part de progrès dans l'évolution collective de la terre. Mais un phénomène particulier se produit dans notre laboratoire : dans la vie ordinaire ou dans un yoga individuel, cette ombre est plus ou moins latente, plus ou moins gênante et elle finit par se dissoudre ou, plutôt, par s'enfoncer dans une oubliette ; mais dès que l'on se met à un yoga terrestre, on s'aperçoit qu'elle ne s'enfonce pas du tout ; elle sort et ressort avec une virulence infatigable, comme si la bataille n'était jamais gagnée... comme si, en vérité on faisait la bataille sur ce point vibratoire particulier pour la terre entière ; il semblerait que le chercheur soit devenu le lieu d'une bataille spéciale, aiguë, symbolique de la même bataille, plus ou moins larvée, sur le même point d'ombre, dans le reste des individus humains. "Vous ne faîtes plus votre yoga pour vous seul, vous faîtes le yoga pour tout le monde, sans le vouloir, automatiquement." Et le chercheur vérifie in vivo le principe de l'unité substantielle du monde : si l'on se mêle de redresser une seule vibration en soi, ce sont des myriades de petites vibrations frères, ou soeurs, qui résistent à travers le monde. 

C'est ce que Sri Aurobindo appelle un "yoga pour la conscience terrestre"; (On Himself) "Parce qu'il accepte la vie, le chercheur du yoga intégral doit porter non seulement son propre fardeau, mais en même temps une grande partie du fardeau du monde, qui vient s'ajouter à sa charge déjà suffisamment lourde. Par suite, son yoga bien plus que les autres ressemble à une bataille ; et ce n'est pas seulement une bataille individuelle, c'est une guerre collective livrée sur un pays immense. Il ne suffit pas qu'il conquière en lui-même les forces égoïste du mensonge et du désordre, il faut encore qu'il les vainque comme les représentants des mêmes forces adverses inépuisables dans le monde. Ce caractère représentatif leur donne une capacité de résistance bien plus obstinée, un droit de récurrence presque sans fin. Souvent donc, le chercheur s'apercevra que même après avoir gagné avec persistance sa bataille personnelle, il devra la gagner encore et encore dans une guerre qui semble interminable, parce que son existence intérieure est déjà si élargie que non seulement elle contient son propre être avec ses expériences et ses besoins bien définis, mais qu'elle est solidaire aussi de l'être des autres ; car en lui-même il porte l'univers.(La Synthèse des Yoga).

Satprem ~ "Sri Aurobindo ou l'Aventure de la Conscience" chap XVII ~ La Transformation ~

lundi 22 juin 2015

Om Namo Baghavate



Le premier mot représente:
l'invocation suprême, l'invocation du Suprême.

Le deuxième mot représente:
le don total de soi, la soumission parfaite.

Le troisième mot représente:
l'aspiration, ce que la manifestation doit devenir-Divine

La Mère

mardi 17 mars 2015

LES GUERRIERS DU RÉEL




Ils sont les guerriers du Réel,
Eux qui n’ont d’autres ennemis qu’eux-mêmes,
Eux dont la seule arme est leur sincérité
Et l’abandon de soi leur unique stratégie.
Eux qui savent qu’il n’est qu’un combat,
Où mourir à soi-même est la seule issue,
Pour ne laisser que des cendres de l’existence
Dont puisse renaître sans fin le phœnix mystique de la Vie.
Alchimiser l’Enfant d’Or des épaisseurs de plomb de l’ego
Pour enfin transpar-être au sein d’un monde solaire,
Alors, dans un coup de Grâce s’évanouiront les guerriers,
Réalisant dans la béatitude absolue que jamais ils ne furent.
Diksha