Introduction à l'éveil spirituel ...
par Thierry Vissac
Qu’est-ce que l’éveil spirituel ?
On parle d’éveil dans toutes les écoles spirituelles, depuis
le bouddhisme jusqu’aux courants New Age plus récents. Après avoir connu des «
saints », des « sages » et des « illuminés », nous avons, depuis quelques
temps, affaire à des « éveillés ». L’éveil spirituel est une notion qui désigne
quelque chose de précieux mais qui, comme beaucoup d’autres, a perdu un peu de
son sens.
Quel est donc le sens de cette expression ? Que
désigne-t-elle ?
À l’origine, l’invitation à l’éveil spirituel est faite aux
êtres assoupis dans un certain sommeil. Le sommeil en question signifie le fait
de vivre dans le rêve ou dans l’illusion. L'éveil spirituel est donc
l'émergence de la conscience hors du monde fantasmagorique des illusions, un
peu comme la conscience sort du sommeil après une nuit de cauchemars.
Quelles sont les illusions ?
La première illusion, qui fonde toutes les autres, est la
croyance que la vie s'organise par notre intelligence personnelle (contrôle,
maîtrise, projections sur l'avenir). Cette illusion indique que l’on a perdu de
vue l'Intelligence de la Vie qui organise toute chose à tout moment.
La seconde illusion, qui découle de la précédente, est la
croyance que nous sommes une "personne isolée", face aux autres ou
contre les autres, séparée de tous et en danger permanent (d’où nécessité de se
protéger continuellement). Une telle perception est cause de guerre, de
conflit, de violence et conduit à l'impossibilité d’être réellement en relation
avec qui ou quoi ce que ce soit.
Une troisième illusion, plus dynamique celle-là, et fondée
sur les précédentes, se trouve dans le fait d’investir notre énergie
exclusivement dans le transitoire comme si les choses étaient éternelles
(famille, profession, propriétés). Cette illusion amène à la révolte et la
souffrance chaque fois que nos projets s’effondrent.
Une autre illusion dynamique est de croire qu'il existe
un(e) ou des autres capables denous apporter le bonheur (cette illusion a créé
le mythe de l'âme-soeur) ou, au contraire, responsables de notre malheur.
Beaucoup de larmes sont versées à partir de cette croyance parce que cette
quête « vers l’extérieur » est sans fin et toujours vaine.
Enfin, la dernière illusion, particulièrement active dans
les milieux philosophiques et spirituels, conduit à croire en l'autorité et en
la suprématie de la pensée, de l'intellect et donc du jugement. Son corollaire
consiste à se fixer des objectifs à partir de fantasmes, un des plus courants
étant celui qui promet d’« atteindre un état de béatitude permanente » et, bien
entendu, de se désespérer de ne jamais y parvenir.
Que produit l'éveil spirituel ?
L'éveil spirituel, par la dissolution des croyances et
illusions évoquées ci-dessus, révèle notre unité intrinsèque avec les
mouvements de la vie (contre lesquels nous luttions en permanence), notre lien
avec nos congénères (voilé par le sentiment de séparation), l'éternité de
l'existence (au-delà des projets et objets de l'univers personnel). Dans cet
éveil, nous réalisons que nos illusions étaient la cause de toutes nos
souffrances. Mais nous voyons surtout émerger la joie et la paix qui naissent
de l'accueil de ce qui est et l'ouverture du coeur qui en résulte relâche
spontanément l'emprise du mental, l’étau de la certitude intellectuelle et tous
les cadres étroits que nous avions pris pour "notre vie".
Et maintenant ?
Il est peu probable que ces mots produisent spontanément un
quelconque éveil. Le mental y trouvera peut-être des confirmations
intellectuelles ou encore des occasions de discuter mais pour que l’éveil soit
une réalité vivante, il faut, un jour, faire le pas hors du cadre des
conceptions. Pour cela, l’Intelligence de la Vie glisse parfois malicieusement
quelques peaux de bananes sous nos pieds (que nous prenons pour des obstacles
se dressant dans notre course effrénée vers nulle part), elle provoque des
surprises dans le continuum de nos projets personnels (que nous prenons pour
des entraves à notre besoin de contrôle), elle nous met en présence de rappels
de notre vraie nature (que nous accueillons tragiquement comme un sentiment de
perte, alors que seule l’illusion peut être perdue), et nous invite (parfois
sans ménagement) à revenir à ce qui est, à nous réveiller du mirage de ce que
l’on voudrait qui soit et à redevenir participants et serviteurs d’un processus
immense et magistral qui s’appelle la Vie.